Oraison funèbre – poème de Sándor Márai

Oraison funèbre – poème de Sándor Márai, traduit du hongrois et préfacé par Fanni Endrodi-Engel

A l’occasion du 35eme anniversaire de la mort de Sándor Márai, et dans le cadre de la série d’événements que nous organisons en son honneur au mois d’octobre et de novembre, nous avons le plaisir de vous faire découvrir la première traduction française d’un des poèmes les plus célèbres de Sándor Márai, Oraison funèbre, avec une petite préface de la traductrice Fanni Endrodi Engel. 

Travailler sur « Oraison funèbre », ce n’est pas seulement traduire les mots de Sándor Márai, c’est aussi traduire le plus ancien texte hongrois retrouvé, le sublime « Halotti beszéd és könyörgés » (Oraison funèbre et prière).
C’est aussi traduire les vers de Mihály Vörösmarty qui se mêlent adroitement au texte.
C’est aussi prendre en compte la couleur et l’émotion des multiples références littéraires et culturelles qui parsèment cette oraison qui dit adieu au pays natal et relate avec une voix triste mais ironique la vie d’immigré.
Traduire ce texte est passionnant : les pensées fusent, les tableaux se succèdent rapidement et oscillent entre passé hongrois et avenir étranger. Les vers sont longs, les rimes sont riches, les références sont précises.
Comment rendre les lectrices et lecteurs sensibles à la nostalgie de la Hongrie, en français ? Comment évoquer des lieux, des odeurs, des prénoms qui ne créent pas directement d’image mentale ? Telle était la mission la plus difficile et la plus passionnante de cette traduction.

Oraison funèbre

De vos yeux, vous voyez ce que nous sommes, mes pairs,
Nous sommes cendre et poussière.
Nos souvenirs se désagrègent comme de vieux tissus.
L’île Marguerite, encore, la reconstruis-tu ?
Tout n’est que fragment, bout de verre, breloque surannée,
Le mort devient barbu, ton nom n’est que donnée.
Notre langue aussi s’effrite, se déchire et les mots si chers,
Sous la voûte du palais, se dessèchent, deviennent poussière.
« Papillon », « perle », « cœur », ce n’est plus ce que c’était
Quand dans une langue de famille le poète chantonnait.
Et on l’entendait, comme d’une nourrice la mélodie
Qu’en plein rêve un enfant entend, geignard et assoupi.
Nos battements cardiaques, langue secrète ; nos rêves, aux bandits,
Tu lis Toldi à ton enfant : « ok », voilà ce qu’il te dit.
Déjà le prêtre grogne en espagnol, sur nos cercueils penché :
« Des souffrances de la mort me voilà entouré ».
Dans les mines de l’Ohio, la pioche s’abat,
Ta main flanche et de ton nom l’accent s’en va.
Tu entends Babits parler quand gronde la mer Tyrrhénienne,
La harpe de Krúdy fait vibrer la nuit australienne.
On t’appelle encore, on t’écrit, d’une voix grave et spectrale,
Ton corps aussi se rappelle, vieux souvenir familial.
Tu t’écries encore : « Une volonté si divine, cela ne se peut faire… ! »
Mais tu sais déjà : cela se peut… et tu extrais le minerai de fer
En Thuringe. Pas de poste. Personne n’ose écrire.
Nul signe de travaux forcés : les morts, inutile de les gémir.
Le consul mâche du chewing-gum, essuie ses binocles, à cran,
Un spectacle, fatigué des nombreux tampons et documents –
Il reçoit mille par mois, et une voiture. La Mistress et le baby
Posés en photo sur son bureau. Pour lui, qui était Ady ?
Qu’était un peuple? Que sont mille ans ? Musique et poésie?
Arany et ses mots?… Rippli et sa couleur? Bartók et son farouche esprit?
« Tant de cœurs, cela ne se peut faire… » Du calme. Cela se peut.
Les grandes puissances s’échangeront de longs registres d’ici peu.
Toi, tais-toi et écoute. Sache que le petit chacal vit déjà
Qui, sur ta tombe africaine, bèche de ses dix doigts.
Le cactus sauvage germe déjà, ton nom est dissimulé
Sur la stèle mexicaine : que personne ne vienne te chercher.
Tu crois encore que tu vis?… Quelque part ? Et si nulle part,
Dans le cœur de tes frères?… Non, ça, c’est aussi un cauchemar.
Tu entends encore le râle plaintif : « Un frère par son frère vendu »
Une voix agonisante intervient : « Que ta bouche soit cousue »
Et un autre gémit : « Que celui qui pleure la nation au loin »
Encore un dans un râle : « À le haïr ne soit contraint ».
C’est donc ainsi. Keep smiling. Ne demande à personne « Pourquoi ? »
Ni « Étais-je pire que ceux-là ?… » Tu étais hongrois, et voilà.
Estonien, lituanien, roumain… Tais-toi et paye à présent.
Les Aztèques aussi expirèrent. Ce qui doit être sera, finalement.
Un jour, un grand savant te déterre, tête de cheval desséchée,
La cendre radioactive aura tout enterré.
Supporte que tu n’es plus homme là-bas, simple ennemi de classe,
Supporte que tu n’es plus homme ici, simple chiffre dans une masse.
Supporte que Dieu supporte cela et que le ciel sauvage et écumant
Ne vient pas allumer d’éclairs, la sagesse, c’est intéressant.
Souris, quand par le tortionnaire ta langue est arrachée,
Même dans le cercueil, sois reconnaissant qu’on t’ait enterré.
Tes épithètes, tes rêves, garde-les férocement,
Ne pipe mot, quand le boss compte tes dents.
Serre fort ton cabas, tes loques, tes miséreux
Souvenirs : une photo, un poème, une mèche de cheveux.
Car c’est ce qui reste. Avare, passe encore en revue
Chacun des sept châtaigniers de ta vieille rue,
Et le recueil de Shelley, Jeannot ne l’a jamais rendu.
Et la corde du bourreau, elle ne se vend plus.
Et le sang dans le cerveau tarit, se dessèchent nos nerfs,
De vos yeux, vous voyez ce que nous sommes, mes pairs,
Nous sommes cendre et poussière.

 
Halotti beszéd

Látjátok, feleim, szem’ tekkel mik vagyunk
Por és hamu vagyunk.
Emlékeink szétesnek, mint a régi szövetek.
Össze tudod még rakni a Margitszigetet? …
Már minden csak dirib-darab, szilánk, avitt kacat
A halottnak szakálla nőtt, a neved számadat
Nyelvünk is foszlik, szakadoz és a drága szavak
Elporlanak, elszáradnak a szájpadlat alatt
A „pillangó”, a „gyöngy”, a „szív”- már nem az, ami volt
Amikor a költő még egy család nyelvén dalolt
És megértették, ahogy a dajkaéneket
A szunnyadó, nyűgös gyerek álmában érti meg
Szívverésünk titkos beszéd, álmunk zsiványoké
A gyereknek Toldi – t olvasod és azt feleli, oké
A pap már spanyolul morogja koporsónk felett:
„A halál gyötrelmei körülvettek engemet”
Az ohioi bányában megbicsaklik kezed
A csákány koppan és lehull nevedről az ékezet
A tyrrheni tenger zúgni kezd s hallod Babits szavát
Krúdy hárfája zengi át az ausztrál éjszakát
Még szólnak és üzennek ők, mély szellemhangokon
A tested is emlékezik, mint távoli rokon
Még felkiáltsz: „Az nem lehet, hogy oly szent akarat…”
De már tudod: igen, lehet… És fejted a vasat
Thüringiában. Posta nincs. Nem mer(n)ek írni már.
Minden katorga jeltelen, halottért sírni kár
A Konzul gumit rág, zabos, törli pápaszemét
Látnivaló, untatja a sok okmány és pecsét –
Havi ezret kap és kocsit. A Mistress s a baby
Fénykép áll az asztalán. Ki volt neki Ady?
Mi volt egy nép? Mi ezer év? Költészet és zene?
Arany szava?… Rippli színe? Bartók vad szelleme?
„Az nem lehet, hogy annyi szív…” Maradj nyugodt. Lehet.
Nagyhatalmak cserélnek majd hosszú jegyzékeket.
Te hallgass és figyelj. Tudjad, már él a kis sakál
Mely afrikai sírodon tíz körmével kapál
Már sarjad a vadkaktusz is, mely elfedi neved
A mexikói fejfán, hogy ne is keressenek
Még azt hiszed, élsz? … Valahol?… és ha máshol nem is
Testvéreid szívében élsz ?…Nem, rossz álom ez is.
Még hallod a hörgő panaszt: „Testvért testvér elad…
Egy hang aléltan közbeszól: „Ne szóljon ajakad…”
S egy másik nyög: „Nehogy ki távol sír e nemzeten…”
Még egy hörög: „Megutálni is kénytelen legyen.”
Hát így. Keep smiling. És ne kérdjed senkitől, miért?
Vagy: „Rosszabb voltam mint ezek ?…” Magyar voltál, ezért.
És észt voltál, litván, román … Most hallgass és fizess.
Elmúltak az aztékok is. Majd csak lesz, ami lesz.
Egyszer kiás egy nagy tudós, mint avar lófejet
A radioaktív hamu mindent betemet
Tűrd, hogy már nem vagy embert ott, csak osztályidegen
Tűrd, hogy már nem vagy ember itt, csak szám egy képleten
Tűrd, hogy az Isten tűri ezt s a vad, tajtékos ég
Nem küld villámot gyújtani, hasznos a bölcsesség
Mosolyogj, mikor a pribék kitépi nyelvedet
Köszönd a koporsóban is, ha van, ki eltemet
Őrizd eszelősen néhány jelződet, álmodat
Ne mukkanj, amikor a boss megszámolja fogad
Szorongasd még a bugyrodat, rongyaidat, szegény
Emlékeid: egy hajfürtöt, fényképet, költeményt –
Mert ez maradt. Zsugorin még számbaveheted
A Mikó-utca gesztenye fáit, mind a hetet,
És Jenő nem adta vissza a Shelley-kötetet
És már nincs, akinek a hóhér eladja a kötelet
És elszáradnak idegeink, elapadt vérünk, agyunk
Látjátok, feleim, szemtekkel, mik vagyunk
Íme, por és hamu vagyunk.